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Le secteur pétrolier, un enjeu central du conflit irano-américain

Le retrait américain de l’accord nucléaire avec l’Iran pourrait avoir des répercussions profondes pour le marché pétrolier, et donc l’économie planétaire.

Lors d'un entretien avec Investment Officer, Greg Sharenow, gérant de portefeuille spécialisé dans les matières premières chez Pimco, a indiqué que l’Arabie Saoudite et la Russie envisageaient désormais de revenir sur leur engagement à réduire la production afin de soutenir le cours du pétrole. Ces deux pays subissent probablement des pressions de la part du gouvernement américain, qui souhaite éviter que de nouvelles sanctions à l’encontre de l’Iran n’entrainent une nouvelle baisse de l’offre pétrolière, et donc une hausse des prix.

Or, selon les opérateurs, la pression américaine a l’effet escompté : le baril de pétrole européen cote un peu plus de 75 dollars, soit près de 5 dollars de moins que son sommet de la semaine dernière. Le pétrole américain a même baissé à 66,78 dollars. 

Une hausse du cours de l’or noir serait inopportune, tant pour des raisons économiques que politiques. Aux États-Unis, les élections parlementaires de mi-mandat sont prévues cet automne.

L’économie américaine est devenue moins sensible à la hausse des cours pétroliers qu’auparavant, en premier lieu grâce au développement du pétrole et gaz de schiste, une révolution qui réduit la dépendance américaine aux importations énergétiques. Mais le pays manque de main-d’œuvre spécialisée et de capacités de forage, ce qui limite la réponse américaine face à ces hausses de cours.

En outre, les sanctions qu’entend imposer Donald Trump sur les importations d’acier et d’aluminium risquent de faire augmenter les coûts de production.

Les fluctuations de cours touchent surtout les consommateurs

Les cours du pétrole ayant atteint un étiage en 2015 et 2016, les investissements dans le secteur pétrolier ont diminué de près de 70 % entre 2014 et 2016, si bien que les capacités sont désormais insuffisantes pour profiter de la hausse des prix.

« À l’inverse de ce qui s’était passé lorsque les cours avaient baissé et que les producteurs, en réduisant leurs investissements, avaient gommé les avantages économiques, ce sont surtout les consommateurs qui vont faire les frais des hausses actuelles, dans la mesure où ces dernières amputent leur pouvoir d’achat réel », met en garde Greg Sharenow, ajoutant que les syndicats n’ont pas assez de poids aux États-Unis pour s’opposer à la hausse du coût de la vie. « Sur ce point, les États-Unis ne peuvent être comparés aux pays européens tels que l’Allemagne. Je pense donc que les consommateurs seront les plus touchés par la hausse des prix des carburants. » Pimco estime que le baril de pétrole américain franchira cette année la barre des 80 dollars.

Donald Trump n’a rien à gagner à la hausse des cours énergétiques

À l’instar de ce que font de nombreuses entreprises cotées aux États-Unis, les producteurs américains de pétrole devraient profiter de la hausse des cours de l’or noir pour renforcer leur bilan en se désendettant, en rachetant des actions et en versant des dividendes.

Le président américain a toutefois intérêt à ce que cette hausse des cours énergétiques reste limitée, puisqu’un certain nombre de parlementaires du Congrès doivent être élus ou réélus à l’automne, et que les Républicains pourraient en théorie perdre leur majorité.

Dans ce contexte, il existe un lien entre le retrait américain de l’accord nucléaire conclu avec l’Iran en 2015 et les répercussions négatives d’une hausse des cours du pétrole. Ainsi, sous la présidence de Barack Obama, les exportations iraniennes de pétrole avaient baissé pour atteindre 1,5 million de barils par jour. Les nouvelles sanctions que menace d’imposer Washington pourraient encore entraîner une baisse de 500 000 barils par jour de pétrole. 

Une situation très complexe

Les ministres russe et saoudien de l’Énergie ont déclaré vendredi dernier, à l’issue d’une concertation à Saint-Pétersbourg, qu’un relèvement des quotas de production convenus précédemment serait évoqué lors de la réunion de l’OPEP de juin. Ces quotas, qui datent de 2014, ont permis d’endiguer la baisse spectaculaire des cours pétroliers, alors que le baril atteignait à peine 40 dollars. 

Si la Russie semble prête à adapter ces plafonds, l’Arabie Saoudite se montre plus réservée. Le pays procède en effet actuellement à une restructuration de son économie et a besoin de revenus supplémentaires pour la financer.

« La situation est très complexe. Malgré les derniers signaux pointant vers un assouplissement des quotas de production, personne ne sait vraiment ce qui va se passer », conclut le gérant de Pimco.